L’Université Euro-méditerranéenne de Fès a inauguré, vendredi 27 février, son « cycle de conférences 2015 », en invitant de grandes figures du monde scientifique et académique. 

Catherine Bréchignac, Secrétaire perpétuel de l’Académie de sciences, est intervenue sur le thème: « Science et société: raison et déraison » et François Guinot, Président du Groupe interacadémique pour le développement, sur « L’innovation technologique comme facteur de progrès des sociétés humaines ». Ces deux interventions ont été vivement appréciées par le public venu nombreux écouter et réagir à deux grands experts. 

Dans sa conférence intitulée « L’innovation technologique comme facteur de progrès des Sociétés Humaines », François Guinot s’interroge sur les conditions d’accomplissement d’un tel progrès et explique ses implications sur un co-développement Euro-Méditerranéen. A ce titre, il rappelle que de la même manière que des Hominidés, par symbiose avec leurs outils, ont évolué vers « homo sapiens », les sociétés humaines d’aujourd’hui évoluent par symbiose avec les techniques et les technologies. Il explique que l’homme s’invente continuellement dans ses deux composantes culturelle et naturelle, indissociables, interactives et parfois conflictuelles et argumente son propos par de nombreux exemples ayant marqué l’histoire de l’homme et son existence. C’est ainsi que l’apparition du langage articulé s’imposa lorsque la gestuelle et les signes vocaux ne suffisaient plus à la transmission des savoirs accumulés par l’homme. Plus les connaissances s’accroissent, plus les outils se sophistiquent et plus la société s’affirme dans son rôle de médiateur.

Puis, il se questionne sur les conditions d’une symbiose efficace et s’arrête sur la définition des mots « technologie, invention et innovation », pour dire que la technologie n’est ni plus ni moins qu’une combinaison de savoirs et devient une invention dès lors qu’elle s’avère originale. L’innovation est une rencontre entre une invention et un besoin sociétal ressenti et la décision d’intégrer une invention est dictée par le progrès qui en résulte. Une telle décision est prise à la fois par la société dont le choix s’exerce par les mécanismes du pouvoir et par l’entreprise dont le choix s’opère par des mécanismes du marché.

Aussi, les conditions d’une symbiose efficace se réduisent-elles à des structures favorisant l’invention et à un corpus de valeurs qui guide les choix d’innovation. Partant, le rôle de toute société ouverte aux innovations consiste à :

  • Veiller à ce que l’éducation apporte aux apprenants la base de savoirs indispensables à la compréhension du monde, et l’ouverture d’esprit nécessaire à leur liberté de choix ;
  • Favoriser la maitrise de la langue qui ouvre aux concepts ;
  • Protéger contre les peurs et les dérives démagogiques par l’exercice du raisonnement ;
  • Construire un système global et équilibré d’enseignement et de recherche, propice aux inventions ;
  • Transformer ces dernières en innovations relève ensuite de l’entreprise, une autre structure majeure de la symbiose Homme-Machine.

Au-delà des nombreux préalables à l’émergence d’un écosystème favorable à l’innovation, l’entreprise a besoin également d’un corpus de valeurs, un référentiel solide sans lequel la société perd ce qui éclaire le chemin de son avenir et de conclure : « Exclure la raison, n’admettre que la raison ; tels sont les excès à éviter ». Evoquant les sociétés du sud du pourtour méditerranéen, François Guinot pense que leur challenge réside moins dans le combat entre la raison et la déraison que dans la quête d’une harmonie entre la raison et la spiritualité, entre la science et la sagesse.

Enfin, il termine par l’analyse des implications de cette symbiose largement évoquée, sur les sociétés du pourtour Euro-méditerranéen. Il rappelle à ce propos les nombreux défis auxquels elles sont confrontées : un patrimoine naturel unique, fragile et menacé, un patrimoine culturel matériel, dégradé mais attractif et représente un facteur potentiel de développement, une pression démographique galopante, une forte croissance du trafic maritime, des problèmes d’urbanisation et d’assainissement, d’accès à l’eau et à l’emploi. Tenter de relever autant de défis implique la mobilisation de tous les savoirs, de part et d’autre de cette rive méditerranéenne. Il précise que cette mobilisation est la raison d’être du Groupement Interacadémique pour le Développement qui ambitionne de contribuer à un véritable co-développement Euro-Africain et termine sa conférence, en exprimant avec certitude, l’existence de possibles rencontres du GID avec les objectifs et les missions de l’Université Euro-Méditerranéenne de Fès, à la fois dans la réflexion et dans l’action.

 

De manière générale, «en organisant ce cycle de conférences tout au long de l’année 2015, l’UEMF entend confirmer une de ses principales vocations, celle de diffuser le savoir, la science et la culture et de faire en sorte qu’ils soient accessibles à tous», indique Mustapha Bousmina, président de l’UEMF. Il ajoute : «une fois par mois, un acteur de notoriété publique, connu et reconnu, sera invité à traiter une de ces questions qui préoccupent la société et répondre aux interrogations du public, sur des thématiques originales vivantes et accessibles». 

Dans la continuité, le 2 avril dernier, une nouvelle conférence intitulée: « Histoire de la chimie » a été donnée par le prix Nobel de chimie, le professeur Jean Marie Lehn.

 

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